Les libertés publiques en temps de Covid-19

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David contre Goliath

Les régimes d’exception

Les termes État d’urgence, Circonstances exceptionnelles, Etat de siège, sont des termes souvent mélangés et utilisés sans contour précis. La France connaît 4 types de régimes “d’exception” :

– La Constitution prévoit les articles 16 (pleins pouvoirs) et 36 (état de siège) :

– L’État d’urgence est un régime législatif provenant de la loi du 3 avril 1955

– Les circonstances exceptionnelles, elles, sont reconnues par la jurisprudence administrative.

Ces notions répondent à des conditions particulières et des règles précises mais tous ces régimes ont pour but unique de permettre à l’Etat -régime démocratique-  d’affronter une situation particulière et de répondre à des risques pour la population mais également pour les institutions étatiques elles-mêmes.

Le principe :
– compétences accrues pour l’Exécutif
– libertés restreintes
– pour un délai court.

Et pour revenir au plus vite dans une situation normale

L’article 16

Ce régime juridique concentrant les pouvoirs aux mains du président de la République exige deux conditions : – “que les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire, ou l’exécution de ses engagements internationaux soient menacés de manière grave et immédiate ;- » et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels soient interrompus”.

La décision d’y recourir est un acte DE gouvernement, donc inattaquable. Le Parlement ne peut alors être dissous mais il est réduit à peu de pouvoir en pratique. 

L’article 16 a été appliqué une seule fois sous la Vème République entre le 23 avril 1961 jusqu’au 29 septembre de la même année soit 5 mois. Depuis la réforme constitutionnelle de 2008, le Conseil constitutionnel peut être saisi ou s’auto saisir au delà de 30 jours d’application.

L’État de siège

Ce régime juridique est issu de l’ancien régime et n’a jamais été utilisé sous la Vème République. Ce dispositif demeure dans notre bloc de légalité ayant été amené à s’appliquer en 1919 et 1939. Est exigé pour son instauration une insurrection armée ou une guerre étrangère.

Il est décrété par un décret en conseil des ministres avec un délai clair de 12 jours.

Pour éviter une toute puissance de l’exécutif, le prolongement s’effectue par la loi. 

L’État d’urgence

La source est la volonté du pouvoir de gérer par la force les soulèvements en Algérie en 1955. 

Ce régime juridique intervient quand un péril imminent résulte d’atteintes graves à l’ordre public ou quand des événements présentent par leur nature et leur gravité le caractère de calamité publique.

Il est décrété en conseil des ministres (avec un délai précis) et il est prolongé par la loi pour éviter la toute puissance de l’Exécutif.

Ce régime renforce les pouvoirs de police administratives (prévention) de l’Etat. Les préfets représentant du gouvernement sur le territoire et le Ministre de l’Intérieur se trouvent renforcés dans leurs compétences. 

Les Circonstances exceptionnelles

Le Conseil d’Etat dans un arrêt Heyries a décidé de recourir à cette notion atténuant le bloc de légalité en présence de deux conditions cumulatives :

– une situation anormale et grave (guerre, tremblement de terre ou on peut l’imaginer une situation sanitaire catastrophique) ;

– et une impossibilité pour l’administration de respecter la légalité normale.

Le Conseil constate ces circonstances toutes particulières et s’imposant à lui. 

L’impact des régimes d’exception sur les libertés publiques

L’État de siège

L’État de siège confie à l’autorité militaire le maintien de l’ordre transmet la compétence de police à  l’autorité militaire, avec une extension de ces compétences. Le régime est très permissif et peu protecteur à  l’égard des libertés publiques 

L’État d’urgence

L’État d’urgence autorise les perquisitions domiciliaires jour et nuit. Ces perquisitions administratives doivent répondre à des “raisons sérieuses de penser que ce lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre public (en dehors des lieux affectés à l’activité des journalistes, magistrats et avocats sans oublier les lieux de mandats des parlementaires). 

Les préfets ou le ministre de l’intérieur peuvent prendre des dispositions pour la fermeture provisoire de salles de spectacles, débits de boissons  et lieux de réunions de toute nature dans les zones déterminées.

Il est également possible d’éloigner ou d’interdire le séjour de tout ou partie d’un département de toute personne qui entrave l’action des pouvoirs publics et ce de quelque manière que ce soit. 

Surtout, ce régime permet d’aller à l’encontre de la liberté d’aller et venir. Les préfets peuvent ainsi interdire la circulation de personnes et de véhicules, et le ministre de l’Intérieur peut assigner à résidence. 

Les circonstances exceptionnelles

Lorsqu’elles sont reconnues, une tolérance à l’égard de l’administration est admise par le juge. Son indulgence s’exerce à l‘égard de toutes les conditions de légalité de l’acte administratif. Une voie de fait (faute grave) redevient une faute de l’administration.

Dans tous ces cas exceptionnels, le juge est le garant de la  sauvegarde de la légalité en face d’une démocratie frappée par l’incroyable.

Dans ces cadres dits exceptionnels, le juge administratif considère la situation et l’adaptation de la décision ou de l’action administrative par rapport à la situation (contrôle maximum) 

L’État d’urgence n’apparaît pas ainsi comme la situation la plus attentatoire aux libertés.


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